Photographier des personnes : ce que vous devez absolument savoir sur le droit à l’image

Droit et photographie

Vous prenez des photos ? Vous les partagez sur les réseaux sociaux ou votre site web ? Alors ce guide est fait pour vous. Le droit à l’image est un sujet qui inquiète beaucoup de photographes, et pour cause : les règles ne sont pas toujours claires et évoluent constamment. Décryptons ensemble ce que dit vraiment la loi.

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I. Les bases légales à connaître

A. Ce que dit la loi française

L’article 9 du Code civil : votre vie privée est protégée

La loi française protège la vie privée de chacun. Mais attention, petit malentendu fréquent : prendre une photo de quelqu’un sans son accord n’est pas illégal en soi !

Ce qui peut poser problème, c’est l’utilisation de cette photo. Pour qu’une personne puisse vous attaquer en justice, elle devra prouver trois choses :

  • Que vous avez commis une faute
  • Qu’elle a subi un préjudice
  • Que votre faute a causé ce préjudice

Un système qui demande des preuves concrètes

Ce n’est pas si simple de gagner un procès en droit à l’image. La personne qui se plaint doit vraiment démontrer qu’elle a été lésée.

B. Et au niveau européen ?

La Convention européenne des droits de l’homme

L’article 8 de cette Convention (en vigueur depuis 1953) protège la vie privée et familiale de tous. Mais voilà le hic : le texte parle surtout des abus des autorités publiques. Il est beaucoup moins clair sur ce qui se passe quand c’est un particulier ou un média qui diffuse des images.

La liberté d’expression, un contrepoids important

L’article 10 de la même Convention garantit la liberté d’expression et le droit d’informer. C’est ce qui permet aux journalistes et photographes de faire leur travail. Mais où tracer la limite ? C’est toute la question.

C. Les zones floues

Soyons honnêtes : personne ne sait exactement où se situe la frontière entre :

  • Une personne publique (politicien, célébrité) et une personne lambda
  • La vie privée d’une star (Et qui est une star ?) et sa vie publique
  • Ce qui relève de l’intimité et ce qui peut être montré (surtout dans un monde où l’on s’affiche sans cesse sur les réseaux)

Chaque situation est unique, et c’est souvent le juge qui tranche au cas par cas.

droit des personnes photographiées

II. Les bons réflexes avant de publier vos photos

A. Pensez « diffusion » avant « déclencheur »

Voici un conseil d’or : réfléchissez aux conséquences avant de publier, pas seulement avant de shooter. Et distinguez bien deux choses :

  • L’autorisation de photographier quelqu’un
  • L’autorisation d’utiliser et diffuser sa photo

Ces deux autorisations sont différentes ! Même si vous pouviez prendre la photo, vous n’avez peut-être pas le droit de la publier.

Un procès, même gagné, coûte cher en temps, en énergie et en argent. Mieux vaut prévenir que guérir.

B. La règle des 3 « Non » à respecter absolument

Pour dormir tranquille, vérifiez systématiquement ces trois points :

1. Non à l’atteinte à la vie privée

Règle simple : Toute photo prise dans un lieu privé (une maison, un jardin, un bureau…) nécessite une autorisation. Sinon, vous risquez gros.

Même certains lieux publics peuvent être considérés comme « privés » selon le contexte (par exemple, l’intérieur d’un hôpital ou d’une école).

2. Non à l’atteinte à la dignité

C’est le critère le plus subjectif. Ce qui choque une personne peut sembler anodin à une autre. Tout dépend de la culture, de la religion, des valeurs personnelles.

Mon conseil : En cas de doute, montrez la photo à la personne concernée et faites-lui signer une autorisation qui inclut l’image. Vous éviterez bien des tracas.

3. Non au préjudice

Si votre photo cause un tort à quelqu’un (perte d’emploi, harcèlement, atteinte à la réputation…), vous pouvez être poursuivi.

C’est à la personne de prouver le préjudice, ce qui n’est pas toujours facile. Mais les juges sont attentifs : le dommage doit être réel et visible.

Au-delà de la loi : Posez-vous la question humaine : est-ce que cette photo peut nuire à quelqu’un ? Si oui, est-ce vraiment nécessaire de la publier ?

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III. Photographier des biens : attention au propriétaire

A. Le propriétaire a des droits, mais limités

Le proprio d’un bâtiment, d’une voiture ou d’un objet peut exploiter l’image de son bien, mais il n’en a pas le monopole. Tant que votre photo ne lui cause pas de problème, il ne peut pas vous empêcher de la publier.

La condition indispensable : Vous devez avoir pris la photo depuis un espace public (rue, place, parc…). Si vous êtes entré chez lui ou dans sa propriété privée, là c’est différent !

B. Les animaux aussi ?

Oui, juridiquement un animal est considéré comme un bien. Certains propriétaires d’animaux ont essayé de réclamer de l’argent pour l’utilisation de photos de leur chien ou chat. Les tribunaux ont généralement rejeté ces demandes abusives.

Mais attention : cette situation a créé une psychose. Les éditeurs demandent maintenant aux photographes de garantir qu’il n’y aura aucun problème. Mission impossible, puisque le risque zéro n’existe pas !

IV. Quand vous photographiez une œuvre d’art

Si vous photographiez une sculpture, un tableau, un bâtiment design ou du mobilier de créateur, vous entrez dans le domaine du droit d’auteur. C’est un sujet complexe qui mériterait un article entier.

Les pièges à éviter

Surtout si vous comptez utiliser vos photos à des fins commerciales (vente, pub, banque d’images), attention à :

  • Le mobilier design : Une chaise Eames ou une lampe Artemide sont protégées par le droit d’auteur
  • Les posters et affiches : Un poster acheté en magasin ne vous donne pas le droit de l’utiliser dans une pub
  • L’architecture moderne : Un bâtiment récent est une œuvre protégée (pour les monuments anciens, c’est normalement libre, mais certains organismes réclament quand même des droits)

  • Certains éclairages comme celui de la Tour Eiffel est protégé par le droit d’auteur

     

V. L’autorisation : quand faut-il la demander ?

A. Les cas où vous n’en avez pas besoin

Photos d’actualité

Vous couvrez une manifestation, un événement sportif, une catastrophe ? Pas besoin d’autorisation au nom du droit à l’information. C’est le principe de la liberté de la presse.

Photos de rue et reportage social

Vous documentez la vie urbaine, les gens dans les transports, une fête de quartier ? La jurisprudence vous protège (voir l’affaire Luc Delahaye qui a fait date).

Mais attention : Vous devez quand même respecter les 3 règles d’or (vie privée, dignité, pas de préjudice). Un clochard endormi sur un banc, même en pleine rue, a droit au respect de sa dignité.

B. Quand l’autorisation est indispensable

Pour toute photo d’illustration ou à usage commercial (publicité, site web d’entreprise, brochure…), l’autorisation écrite est vivement recommandée. C’est même quasiment obligatoire si vous voulez éviter les ennuis.

C. Comment faire une bonne autorisation

Ce qui rend une autorisation inutilisable :

  • Pas de date ou d’identité complète (nom, prénom des deux parties)
  • Absence de signature
  • Pas de limite de durée ou de précision sur l’usage (web, print, affichage…)
  • Signée par un mineur (il faut l’accord des parents)
  • Pour les enfants de parents séparés : mieux vaut avoir l’accord des DEUX parents pour éviter les conflits

Le plus simple est de télécharger mon modèle en vous rendant sur mon article, il est axé sur le droit des salariés mais c’est une excellente base de travail que vous pourrez personnaliser.

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VI. Deux situations piégeuses

A. Les photos au travail

Un contrat de travail ne vaut PAS autorisation d’image

C’est une erreur fréquente ! Un salarié qui apparaît sur une photo de l’entreprise doit signer une autorisation spécifique pour l’utilisation de son image.

Pourquoi ? Parce que le contrat de travail concerne uniquement les tâches professionnelles. Utiliser l’image d’un employé pour la communication de l’entreprise, c’est autre chose.

Le risque pour l’employeur

Imaginez : vous licenciez quelqu’un qui figure sur votre plaquette commerciale. Cette personne peut vous attaquer. Ça s’est déjà vu !

Conseil aux photographes : Même si ce n’est pas votre responsabilité directe, prévenez votre client. C’est une question d’éthique professionnelle.

Conseil aux entreprises : Prévoyez une clause de droit à l’image dans vos contrats. Mais, il est conseillé pour une action de communication spécifique (campagne de pub par exemple) de faire signer une autorisation pour ladite action.

B. Le danger du légendage et des titres

Photographe, ne signez jamais un contrat où vous êtes responsable de tout

Refusez tout contrat où le diffuseur vous rend responsable de l’utilisation de l’image… alors que vous n’avez aucun contrôle sur le texte qui l’accompagne !

Une photo innocente peut devenir toxique

De nombreux procès sont nés d’une légende malheureuse ou d’un titre trompeur. La photo en elle-même ne posait aucun problème, mais le texte d’accompagnement a tout changé.

Mettez-vous à la place de la personne

Vous acceptez de poser pour un portrait. Et vous découvrez votre tête illustrant un article sur la délinquance ou l’échec social. Comment réagiriez-vous ? Les conséquences dans votre vie personnelle et professionnelle peuvent être graves.

VII. En résumé : les règles d’or du photographe responsable

Le droit à l’image est un équilibre délicat entre plusieurs libertés :

  • Le droit à la vie privée
  • La liberté d’expression et de création
  • Le droit à l’information

Mes recommandations :

  • En cas de doute, demandez l’autorisation
  • Respectez toujours les trois critères (vie privée, dignité, absence de préjudice)
  • Gardez une trace écrite de vos autorisations
  • Réfléchissez à l’impact humain de vos publications, pas seulement à l’aspect légal
  • En situation commerciale, soyez particulièrement vigilant

 

La photographie est un art merveilleux et un outil puissant. Avec un peu de bon sens et de respect, vous pouvez l’exercer sereinement, sans craindre le tribunal tout en préservant la dignité de chacun.

 

Droit photo : PEXEL Pavel Danilyuk, KATRIN BOLOVTSOVA, Sora Shimazaki

Auteur : Marc CHAZELLE

Artisan photographe Professionnel, installé sur la côte normande, je parcours depuis 15 ans la Normandie et la France pour immortaliser vos réalisations et vos collaborateurs.

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